Pianiste, vocaliste et compositeur, Grégory Privat, a reçu, lundi 4 mars, le prestigieux prix Django Reinhardt (musicien français de l’année) décerné par l’Académie du jazz. Début février a été commercialisé Phœnix, en trio, son huitième album personnel, sans compter ses prestations de « sideman » très recherché (Jacques Schwarz-Bart, Dominique Di Piazza, David Linx…).
Pour Phœnix Grégory Privat retrouve le contrebassiste Chris Jennings et le batteur Tilo Bertholo, ses compagnons de Soley, qui avait été publié sur son propre label, Buddham Jazz (2020) : « Pourquoi Buddham ? Aucune signification… C’est un mot que j’avais inventé quand j’étais petit. Je le mettais à toutes les sauces comme font les enfants. Plus tard, je l’ai trouvé dans un mantra indien ! » Il en sourit : « J’y vois un signe, mais je ne sais pas lequel… »
La formule piano-basse-batterie n’est pas rare. Grégory Privat la détourne délibérément : voix du pianiste mêlée aux claviers, chants créoles venus de loin, une surprenante saveur de pop séduisante ou grave, donnent à Phœnix un son exceptionnel. La curiosité n’est pas seulement là. En créant Buddham, Grégory Privat choisit l’affirmation. Ce n’est pas la première fois.
Apprentissage de la nostalgie
Né à Saint-Joseph (Martinique), le 22 décembre 1984, brillant élève au lycée Bellevue (maths sup, maths spé), Grégory Privat vient d’une famille de musiciens. Son père, José Privat, a succédé à Paulo Rosine (1948-1993), au piano au sein du groupe Malavoi. Malavoi connaît un succès international, les tournées au Japon, les grandes scènes. Inspiré par le légendaire Marius Cultier (1942-1985) pour le piano, et par Eddy Louiss (1941-2015) pour l’orgue Hammond, José Privat publie, ce 29 mars, Clin d’œil (Aztek Musique), avec quelques invités de luxe, dont son fils Grégory. José Privat est retraité de la Sécurité sociale, Grégory a plaqué une belle carrière d’ingénieur en informatique en 2012. Moins simple qu’on ne l’imagine, par les temps qui courent.
Ses études au lycée Bellevue ont conduit Grégory Privat, après les exigeantes prépas en maths, à intégrer une authentique « grande école » : l’« N7 », raccourci confortable pour l’Ecole nationale supérieure d’électrotechnique, d’électronique, d’informatique, d’hydraulique et des télécommunications (ENSEEIHT), à Toulouse. Là, il fait l’apprentissage de la nostalgie. La nuit, il se fait une place parmi les musiciens locaux de tous styles, sans jamais perdre de vue « le pays natal » (Aimé Césaire), la Martinique : d’une densité incroyable en poètes et en musiciens, on l’oublie trop vite, mais aussi en médecins et en ingénieurs en informatique.
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